France Gall

France Gall
1947 † 2018

Plus on avance en âge plus on doit faire le deuil de ceux qui nous ont accompagnés, le temps comme un train, et nous sommes à la fenêtre. Ainsi va la vie. Aujourd’hui France s’en est allée rejoindre son étoile de Berger dans un monde plus haut, un paradis blanc où les nuits sont si longues qu’on en oublie le temps.
Je comprends que ce soit un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup. Je fais partie de ceux qui ont grandi avec Starmania, ceux qui ont eu l’envie de danser pieds nus dans la lumière, alors fatalement, même si on nous prend pour des fous, on s’en fout, c’est un peu du patrimoine de notre enfance qui comme un papillon de nuit se fond dans le silence mais pas l’oubli.

Dans son uniforme de vedette France Gall vivait au rythme des guitares et chantait ses espoirs cachés, ses incertitudes, ses plus grands secrets, c’était sa seule façon d’aimer. Et moi, j’aimais tellement sa voix si mélancolique avec sa propre rythmique et sa joie, douce, douce, douce, musique, pour laquelle elle donnait tout. Son cœur était gravé dans ses chansons, juste deux ou trois mots d’amour, deux ou trois mots de tous les jours, deux ou trois images auxquelles elle croyait, qu’elle envoyait voler dans les haut-parleurs. Son quelque chose dans la voix paraissait me dire «viens», et ça me faisait sentir étrangement bien, j’en aurais joué à saute-mouton sur les vagues ou danser là-bas bientôt le calypso. Des mélodies qui font réaliser que la vie est là, que le matin on se lève en sachant où on va.
Si le bonheur existe, c’est une épreuve d’artiste, et quelle artiste ! Avec de grands yeux aux couleurs des jours heureux. Un regard lumineux malgré ce foutu destin qui lui a fait couper la lumière et le son pour notre plus grand désarroi. Silence les grillons sur les branches immobiles.

Moi je voulais lui dire que les chansons ne s’effacent pas et que c’était bon qu’elle soit là.
Que la musique lui donne la vie encore une fois puisque évidemment, on dansera encore sur ses accords qu’on aimait tant, on rira encore comme des enfants. Mais pas comme avant.

Je vous envoie comme un papillon à une étoile ces quelques mots d’amour,
Au revoir, Madame.