Hier en allumant Twitter j'ai lu un #PrayForOrlando. J'avoue que mon premier réflexe a été de ricaner bêtement en me demandant s'il était arrivé quelque chose au frère de Dalida. Et puis j'ai cliqué. J'ai lu. J'ai appris cette terrible nouvelle de l'attentat au Pulse, un club gay d'Orlando. J'ai arrêté de glousser subitement. Mon second réflexe a été, je l'avoue, de ne pas vouloir utiliser ce hashtag. Certes, toutes les prières ne sont pas dirigées contre les homosexuels, je veux même bien croire que certaines prières nous sont favorables, il est cependant certains que les principales causes de l'homophobie viennent de haines religieuses. Alors, merci, mais non merci. Je prierai de bon cœur quand les religions s'attèleront à construire réellement un monde meilleur et non pas à ravager celui existant.

Outre l'horreur même de cet attentat, il y a quelque chose de terrible, comme un macabre rappel à l'ordre qui nous dirait "Vous pensiez être à l'abri derrière les lois d'ouverture du mariage, vous pensiez être reconnu comme n'importe quel citoyen. Et bien, News Flash, vous ne l'êtes pas et nous voulons toujours votre éradication". Un peu comme si à l'attentat lui-même il avait été ajouté une épée de Damoclès au dessus de nos têtes.
Je me dis que si Stonewall a marqué le début de la lutte des LGBT pour la reconnaissance, peut-être que le Pulse doit être le symbole de notre vigilance. Ne pas baisser la garde, toujours dénoncer et réprimer la moindre déclaration homophobe, que cette parole vienne de groupes religieux ou politiques...
Ne jamais laisser germer la moindre graine d'homophobie.

Plus tard dans la journée, j'ai vu fleurir des déclarations de personnalités et groupes homophobes exprimer leur "peine immense pour les victimes et familles endeuillées" ou leur "compassion pour les victimes, les blessés et leur famille. Ce monde devient barbare." pour ne citer que les propos de LaManifPourTous ou de la Boutin. La barbarie est surtout de s'autoriser ce genre de déclarations quand on a soi-même contribué à répandre des idées qui conduisent à la haine de la différence basée sur l'orientation sexuelle. Quelle indécence ! Je me demande s'ils perçoivent le cynisme de leurs propos. On me dira "Mais que voulais-tu qu'ils disent ? Ils ne peuvent pas applaudir !". Ma réponse est simple, à défaut d'un mea culpa, la seule chose que je leur demande est de se taire.

Et puis le 20h de France2. Premier gros titre du JT "Orlando, 50 morts dans une fusillade". Aucune mention de la spécificiité homophobe de l'attentat dans les titres. Woké...  En lançant le reportage Delahousse daignera tout de même préciser "une discothèque homosexuelle" de la même façon qu'il aurait donné une adresse. Pire encore, il s'interroge sur les motivations du tueur. On lui dit ou pas que c'est évident !?! Le reportage suivant est un déroulé de micro-trottoirs, des gens en pleurs. Aucune analyse, juste du gonzo-gore-movie putassier. Suit un portrait du meurtrier, de sa naissance à sa profession, illustré par une dizaine de selfies. J'ai du mal à croire ce que je vois : un vrai biopic ! A star is born !!! Et moi j'ai envie de fusiller le poste de télévision. En résumé, tout le storytelling de la rédaction de France 2 se résume à dire qu'il a fait allégeance à Daesh juste avant d'ouvrir le feu. En tout et pour tout Delahousse aura dit "homosexuel" deux fois, et la pauvre experte dépêchée sur le plateau aura eu du mal à glisser qu'était visée "une jeunesse qui a choisi de vivre sa sexualité librement.". Petit rappel des attentats sur le sol américain et petit épilogue sur les enjeux de politique intérieure à l'approche des élections US, parce que là est vraiment la question. Et hop, sans transition, le foot !
Je lève les yeux au ciel. À aucun moment le mot "homophobie" aura été prononcé. Comme si le choix de ce lieu avait été un choix innocent. Non. Une fusillade dans un club gay, ce n'est pas un hasard. Il s'agit d'un acte évident motivé par l'homophobie, réseau terroriste ou pas !
Télévision publique de merde. Je zappe.

Ce matin, je fais ma revue de presse et suis effaré de voir le même son de cloche qu'au journal de la veille. L'homophobie évidente de cette fusillade passe à la trappe. Alors je commence à me dire que j'exagère, que j'ai du prendre les choses trop à cœur. C'est alors que je tombe sur cet excellent article de France Culture "Tuerie d'Orlando : géométries variables" dont je vous recommande vivement la lecture. Juste parfait, rien à y ajouter. Invisibilisation.
Aujourd'hui dans les média, les homos sont un peu la fille qui s'est fait violer à qui on refuse de donner la parole, à qui on dit que son dossier n'est pas assez solide pour mériter la justice d'un procès. Combien de temps avant de lui dire qu'elle l'a peut-être un peu cherché aussi ?
Les rédactions ont-elles conscience que cette invisibilisation est à une autre échelle également un acte de terrorisme homophobe ?

J'ai été sensible aux photos et messages de chacun sous le #LoveIsLove. Ce n'est pas grand chose, mais ça donne un peu d'espoir. "United we stand".
Tout comme j'ai été touché par la démarche d'Anne Hidalgo de faire illuminer aux couleurs de l'arc-en-ciel l'Hôtel de Ville et la Tour Eiffel. Cette reconnaissance est certes symbolique, mais au moins, elle a le mérite de damer le pion à ceux qui refusent de voir la spécificité homophobe de cette fusillade.

 Love is Love